Le régime à faibles émissions de carbone : son impact sur l’environnement – et sur vous

La nourriture que l’on mange peut-elle produire un changement au niveau de l’environnement? Découvrez comment le régime à faibles émissions de carbone aide à réduire notre empreinte environnementale.
Publié 18 août 2020

Nous sommes nombreux à planifier nos repas en vue d’atteindre des objectifs de santé, mais serait-il aussi possible de venir en aide à la planète avec nos menus? De nos jours, plusieurs consommateurs soucieux de leur empreinte environnementale se tournent vers les « régimes à faibles émissions de carbone », qui consistent à réduire sa consommation de viande et de produits laitiers pour prendre davantage d’aliments de nature végétale.

Eh non, ce n’est pas la dernière tendance étrange pour perdre du poids, et vous n’aurez pas non plus à cesser de prendre du pain. Il n’y a vraiment qu’une seule grande règle à suivre : choisir ses aliments de façon à minimiser les émissions de gaz à effet de serre (ces composés atmosphériques qui contribuent aux changements climatiques).

« Les aliments que nous mangeons, la façon dont ils sont produits et les déchets que nous produisons – chacun de ces éléments a d’importants impacts sur la planète », de dire Katharine Wilkinson, Ph. D., experte de la géographie environnementale et vice-présidente de Project Drawdown, une ressource à but non lucratif pour les solutions climatiques. 

Les régimes à faibles émissions de carbone ne pourront pas régler à eux seuls les complexes défis environnementaux, bien entendu, mais une étude publiée en 2016 dans PLOS One a conclu qu’une transition de grande ampleur vers une alimentation plus durable pouvait réduire les émissions de gaz à effet de serre associées à la nourriture de 70 %, en plus d’offrir des bienfaits pour la santé humaine.

Poursuivez votre lecture pour découvrir ce que sont vraiment les régimes à faibles émissions de carbone ainsi que les bienfaits qu’ils présentent pour la santé des êtres humains et de la Terre.

 

Le lien entre votre alimentation et votre empreinte de carbone

 

Vous avez probablement déjà entendu parler du dioxyde de carbone, le gaz à effet de serre principal découlant de l’activité humaine selon l’Environmental Protection Agency des É.-U. C’est la raison pour laquelle on parle souvent de notre impact environnemental comme l’« empreinte de carbone ». 

Le dioxyde de carbone n’est en fait qu’un seul des gaz à effet de serre qui se retrouvent dans l’atmosphère, selon Mme Wilkinson. On retrouve dans la liste d’autres noms importants, dont le méthane et l’oxyde d’azote. Ces gaz, qui sont en majeure partie produits par la combustion de combustibles fossiles non renouvelables, mais aussi par certaines pratiques agricoles, font ce qu’on appelle un « effet de serre », c’est-à-dire qu’ils emprisonnent la chaleur du soleil alors qu’elle devrait normalement se refléter sur la surface de la Terre et disparaître. C’est ainsi que la planète se réchauffe.

Le système alimentaire international – qui inclut aussi bien l’agriculture et le pâturage que l’emballage et l’expédition – joue un grand rôle dans ce processus. Dans son ensemble, on lui doit entre 21 et 37 % des émissions totales de gaz à effet de serre (GES) du monde, selon un rapport de 2019 du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat des Nations Unies. 

Chaque aliment produit une quantité différente de gaz à effet de serre pendant qu’il est en route vers votre assiette. Les déchets alimentaires ne sont pas innocents non plus. Des travaux publiés dans le journal Science en 2018 ont tenté d’établir un classement des quatre facteurs les plus importants dans l’empreinte de carbone du domaine alimentaire. Jetons-y un coup d’œil de plus près, en ordre décroissant d’impact. 

  • Ce qu’on mange : Viande et produits laitiers, on vous regarde! Entre toutes les sources de protéines les plus populaires, les ruminants (bovins, agneaux, chèvres, etc.) sont ceux qui produisent le plus d’émissions de GES par gramme de protéines, selon un tableau de bord créé par le World Resources Institute. Pourquoi? Parce qu’en plus d’émettre du méthane lors de leur digestion, ces animaux ont besoin que l’on produise d’immenses quantités de nourriture pour les nourrir, qu’on la transporte et que l’on convertisse des terres à leur intention, autant d’activités qui font augmenter les GES. Qu’en est-il des autres sources de protéine? L’impact du porc, de la volaille et des produits laitiers est considéré comme moyen, tandis que le poisson, les haricots et les œufs n’ont qu’un faible impact.
  • Les déchets : On estime qu’entre 30 et 40 % de l’approvisionnement alimentaire n’est jamais mangé; la majeure partie de ce gaspillage se produirait dans les supermarchés et à domicile, selon le Département de l’Agriculture des États-Unis. Quand la nourriture se retrouve dans des dépotoirs, elle rejette des gaz à effet de serre pendant qu’elle se décompose.
  • La transformation : En général, plus on doit suivre d’étapes pour préparer un produit alimentaire en vue de le vendre, plus son impact environnemental est élevé, indique la diététiste Caroline Passerrello, instructrice à la faculté de la santé et des sciences de la réadaptation de l’Université de Pittsburgh. Par conséquent, explique-t-elle, on émet plus de gaz à effet de serre quand on produit des boîtes de plastique contenant des tranches de pomme que quand on produit des pommes entières, si les deux marchandises sont acheminées de la même façon au supermarché. 
  • Le mode de transport employé pour la nourriture et la distance qu’elle franchit : Justement, la façon dont les marchandises sont expédiées compte aussi. Quel que soit le mode de transport employé, plus la nourriture vient de loin, plus les émissions de GES sont fortes en raison de la consommation de carburant, affirme Eugene Cordero, Ph. D., professeur du département de météorologie et des sciences du climat de l’Université San Jose State. La méthode d’expédition qui a le pire impact environnemental est le transport aérien, mais heureusement, cette approche n’est utilisée que pour une petite partie de l’approvisionnement alimentaire. Le transport par bateau a le plus faible impact, tandis que l’impact des camions et des trains est de niveau moyen.

 

Qu’est-ce qu’un régime à faibles émissions de carbone?

 

[Goals of a low-carbon diet] Le régime à faibles émissions de carbone, c’est surtout une question de bien connaître ce que l’on mange, affirme M. Cordero, qui a également corédigé le livre Cool Cuisine: Taking the Bite Out of Global Warming. Dans ce genre de régime, on met l’accent sur les aliments d’origine végétale qui sont riches en nutriments, comme les légumineuses, les céréales entières, les légumes, les fruits et les noix, tout en réduisant au minimum la nourriture d’origine animale, comme la viande rouge et transformée. Tout cela, comme on l’a dit plus haut, dans le but de choisir des aliments qui ne produisent pas beaucoup d’émissions de GES. 

Ces pratiques générales cadrent bien avec l’approche d’alimentation fondée sur les végétaux qu’encouragent de nombreux experts de la santé, ajoute M. Cordero. La commission EAT-Lancet, une coalition qui regroupe 37 scientifiques de 16 pays, a affirmé dans un rapport de 2019 publié dans The Lancet que les régimes fondés sur les aliments d’origine végétale étaient bons à la fois pour la santé et pour la planète. 

 

Les cinq objectifs du régime à faibles émissions de carbone 

 

Une fois que l’on sait quels sont les facteurs qui contribuent aux émissions de GES de l’approvisionnement alimentaire, les instructions à suivre pour un régime à faibles émissions de carbone sont simples : faites le contraire! Selon les experts, en intégrant certaines de ces idées seulement dans votre routine, vous pourrez déjà réduire votre empreinte environnementale.

 

Réduire sa consommation de viande et de produits laitiers 

 

Bien sûr, vous pourriez devenir végétalien ou végétarien. Cela dit, selon Mme Passerrello, une démarche partielle peut également aider. Vous pourriez par exemple décider qu’un soir par semaine, vous prenez un repas sans viande, ou alors remplacer le bœuf d’une recette par une source de protéines à plus faible impact comme le poulet. Dans votre sandwich, des tartinades végétales comme le guacamole et le hummus remplacent à merveille le fromage et la mayonnaise.

Si vraiment c’est un bon gros hamburger au fromage qu’il vous faut, vous pourriez vous procurer les ingrédients de petites exploitations locales dont les animaux peuvent paître naturellement pour réduire l’impact environnemental, propose Kelly Jones, diététiste de Newtown, en Pennsylvanie. « Ainsi, vous appuierez une approche d’agriculture plus durable », indique-t-elle, car les grandes exploitations font souvent de la surproduction et font venir la nourriture pour animaux de loin.

 

Acheter seulement ce qu’on va manger

 

Mme Passerrello aime bien l’idée de planifier les repas de la semaine pour éviter le gaspillage. Un tel plan, dit-elle, vous aide à savoir quoi acheter à l’épicerie, pour que vous ne vous ramassiez pas avec des articles qui ne sortiront jamais du frigo. Si jamais vous vous retrouvez coincé avec de grandes quantités d’articles sur le point d’expirer, cherchez une recette pour savoir comment les utiliser. (Voici d’ailleurs quelques idées pour les bananes, les fines herbes fraîches et le pain.) Sinon, pour gagner du temps, remplissez bien votre congélateur pour en profiter plus tard. 

Pour ce qui est des rebuts de la cuisine et des aliments déjà gâchés, le compostage peut être une solution intéressante, affirme Mme Wilkinson. Le compost peut enrichir la terre de votre jardin et réduire les émissions de méthane que produisent les dépotoirs.

 

Choisir des aliments peu transformés


Les emballages et processus de production complexes font augmenter les émissions de gaz à effet de serre de la nourriture, de dire Mme Wilkinson. Pour faire une boîte de craquelins, par exemple, il faut fabriquer un sac de plastique intérieur, une boîte de carton, de l’encre et de la colle, en plus de tous les ingrédients et de tous les appareils nécessaires pour produire les craquelins en tant que tels. « Chaque bout de plastique, de papier et d’aluminium que nous produisons nécessite des ressources et émet du carbone, » explique-t-elle. « Plus on prend des aliments dans leur état naturel, mieux c’est pour nous et l’environnement. » 

 

Manger local 

 

En prenant des aliments cultivés près de chez vous, vous aidez à réduire les émissions de GES associées au transport commercial. Vous pourriez par exemple vous inscrire à un programme d’agriculture soutenue par la communauté pour obtenir quelques denrées locales. Généralement, les membres de ces programmes reçoivent chaque semaine des paniers de fruits et légumes (et parfois d’aliments préparés comme le pain et la confiture) d’une exploitation agricole ou d’une ferme collective de la région. Sinon, vous pourriez faire vos achats dans des marchés et de petites entreprises de votre collectivité pour réduire votre empreinte de carbone. Dans les grandes épiceries, des panneaux et des étiquettes indiquent souvent l’origine des aliments : vous pourriez bien y trouver un rayon de produits locaux en vedette.

Bien entendu, on ne peut pas avoir plus local que sa propre cour ou son propre patio. Jetez donc un coup d’œil à notre guide pour commencer un jardin de légumes et de fines herbes.

 

Prendre des aliments de saison

 

Mme Jones vous conseille de vous régaler avec la spécialité de votre région quand elle est en plein dans sa saison : voilà qui vous poussera à manger localement plus souvent! Si les saisons sont très marquées dans votre coin de pays, vous devrez possiblement modifier votre régime alimentaire plusieurs fois dans l’année. Puisqu’elle vit en Pennsylvanie, Mme Jones dit qu’elle prend plus souvent du maïs en épi, des courgettes et des tomates pendant la deuxième moitié de l’été, car il y en a d’immenses quantités à ce moment-là dans sa région. Pendant les autres parties de l’année, elle n’en consomme pas. « [En hiver,] ces récoltes viennent de Californie ou d’ailleurs, ce qui fait augmenter les émissions de carbone associées au transport », dit-elle.

En prime, quand on achète des aliments qui viennent d’être récoltés (comme on le fait en achetant de la nourriture locale et de saison), ils peuvent se conserver plus longtemps à la maison, affirme Mme Jones. Et un autre avantage : les aliments de saison sont souvent offerts à prix réduit, car les fournisseurs cherchent à écouler leurs stocks. Si vous vivez aux États-Unis ou près de la frontière, utilisez l’outil de recherche du Seasonal Food Guide pour savoir ce qui est en saison près de chez vous. 

 

Le régime à faibles émissions de carbone et la santé

 

Les régimes à faible empreinte de carbone sont généralement de meilleure qualité et, souvent, plus nutritifs que les régimes alimentaires riches en viandes et en produits laitiers selon une étude menée en 2019 auprès de 16 000 adultes américains et publiée dans le American Journal of Clinical Nutrition. 

« Changer son alimentation pour l’environnement, c’est manger moins de viande et plus de plantes, ce qui signifie moins de gras saturés et plus de fibres », explique Mme Passerrello. Effectivement, la consommation de grandes quantités de gras saturés est liée à une hausse du taux de cholestérol LDL, le mauvais cholestérol associé aux maladies du cœur et à l’AVC. En revanche, une hausse de la consommation de fibres est associée à une réduction des risques de décès des suites d’une maladie du cœur.

En regardant la situation dans son ensemble, la commission EAT-Lancet a estimé que si tout le monde changeait son alimentation dans l’optique de réduire les émissions de GES, il serait possible de prévenir entre 19 et 24 % des décès d’adultes chaque année.

Pour ce qui est de la perte de poids, elle est certes possible en suivant un régime à faibles émissions de carbone, mais ce n’est pas garanti. En fin de compte, pour perdre du poids, il faut avoir un déficit en calories, explique la diététiste Jaclyn London, M.Sc., nutritionniste-diététiste certifiée, directrice de la nutrition et du mieux-être à WW. Pour obtenir les résultats désirés en remplaçant un bifteck par du tempeh, il faut donc aussi avoir un régime alimentaire global et un mode de vie appropriés.

Cela dit, en général, il est toujours bien de manger plus de végétaux. Selon les toutes dernières Dietary Guidelines for Americans, les régimes alimentaires fondés sur les végétaux sont sains. 

 

Le fin mot de l’histoire : devriez-vous essayer un régime à faibles émissions de carbone? 

 

Selon les experts, les régimes à faibles émissions de carbone (c’est-à-dire, accorder la priorité à des aliments de façon à réduire au minimum les émissions de gaz à effet de serre) peuvent être bons à la fois pour l’environnement et pour la santé humaine. 

Pour réduire l’empreinte de carbone de votre alimentation, il faut commencer par connaître ce que vous mangez. Ensuite, vous n’avez vraiment que quelques petites étapes à suivre : réduire votre consommation de viande et de produits laitiers, manger plus d’aliments d’origine végétale, acheter local et en saison, prendre moins d’aliments transformés et réduire vos déchets alimentaires.

Comme le dit Mme Wilkinson – et plusieurs études publiées sur le sujet – « nous sommes en présence d’une incroyable occasion de manger à la fois mieux pour notre santé et pour la planète. Tout le monde peut en sortir gagnant! »  

 

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Maressa Brown est écrivaine et rédactrice à Los Angeles, et se spécialise dans les questions de santé et de mode de vie. Elle a écrit pour Shape, InStyle, Parents, The Washington Post, Cosmopolitan, Better Homes and Gardens et Women’s Health, entre autres.