Mélatonine : les bienfaits potentiels du sommeil valent-ils la peine de subir ses effets secondaires?

Est-ce que la mélatonine fonctionne vraiment? Poursuivez votre lecture pour savoir si ce complément est sécuritaire ou efficace.
Publié 2 juin 2020 | Mis à jour 11 octobre 2022

La plupart des adultes ont besoin de 7 à 9 heures de sommeil par nuit pour profiter d’une santé et d’un bien-être optimaux. Aux États-Unis, environ 35 % d’entre nous se situent en dessous de ce seuil, et jusqu’à 70 millions de personnes souffrent régulièrement de problèmes de sommeil, comme l’insomnie. Naturellement, plusieurs d’entre elles veulent être soulagées. Les recherches suggèrent que les personnes qui ont un sommeil inadéquat sont plus susceptibles de connaître des problèmes de gestion du poids, de rendement mental, et plus encore. À long terme, la perte de sommeil peut augmenter le risque de développer des problèmes de santé, comme les maladies du cœur, la dépression et le cancer. 

En espérant mieux dormir, de nombreux Américains se sont tournés vers la prise d’un supplément de mélatonine. Il s’agit d’une forme synthétisée de la mélatonine naturelle du corps, une hormone produite dans le cerveau qui aide à réguler les cycles de sommeil et d’éveil. La consommation de mélatonine a plus que doublé chez les adultes entre 2007 et 2012, selon les Centers for Disease Control and Prevention (CDC).

Mais est-ce que la mélatonine fonctionne vraiment pour améliorer le sommeil? Voici ce que vous devez savoir à propos de ce supplément populaire, y compris les circonstances dans lesquelles il peut être utile et la manière de le prendre en toute sécurité.

Qu’est-ce que la mélatonine et quel est son fonctionnement?

La mélatonine, communément appelée « l’hormone du sommeil », est produite naturellement dans la glande pinéale du cerveau. Cette hormone aide à réguler le rythme circadien du corps (horloge biologique, ou cycle veille-sommeil de 24 heures), vous aidant à vous endormir la nuit et à vous réveiller le matin. 

La production de mélatonine par l’organisme augmente lors des transitions entre le jour et la nuit, une réponse biologique à la diminution des niveaux de lumière, explique Ellen Vora, M.D., une psychiatre à l’approche holistique, qui conseille fréquemment ses patients sur la façon d’améliorer la qualité du sommeil de façon naturelle. La production de mélatonine diminue le matin, en réponse à l’exposition à la lumière du jour, ce qui vous aide à vous réveiller.

La mélatonine n’a pas à proprement parler d’action sédative. « La mélatonine n’est pas tout à fait une hormone qui augmente le sommeil; c’est une hormone qui indique au corps quelle heure de la journée il est », explique la Dre Vora.

Un certain nombre de facteurs peuvent altérer la production de mélatonine par l’organisme et perturber le sommeil. L’exposition nocturne à la lumière des écrans de téléphones intelligents, des téléviseurs et de certaines ampoules est l’un de ces facteurs. L’âge en est un autre. « En vieillissant, le niveau de production de mélatonine a tendance à diminuer, ce qui pourrait expliquer pourquoi certaines personnes âgées ont du mal à s’endormir et à rester endormies », décrit Kannan Ramar, M.D., un spécialiste du sommeil à la clinique Mayo et président élu à l’American Academy of Sleep Medicine (AASM).

Mélatonine et sommeil facilité

La recherche est partagée concernant l’efficacité des suppléments de mélatonine pour le sommeil. Les données ne sont pas non plus concluantes quant au moment et à l’endroit où la mélatonine pourrait être utilisée au mieux, souligne le Dr Ramar. 

Ceci dit, l’utilisation à court terme de la mélatonine (pendant moins de trois mois) semble généralement sans danger, et certaines recherches suggèrent que les personnes souffrant de divers types de troubles du sommeil pourraient tirer profit de la prise d’un supplément, à condition qu’elles le prennent au bon moment, à la dose appropriée et pour le problème spécifique qu’elles traitent. 

Comme la mélatonine indique à votre corps l’heure de la journée, elle peut être utile pour atténuer les problèmes de sommeil associés à une horloge biologique déréglée, comme le décalage horaire ou le syndrome de retard de phase du sommeil. Cette molécule peut aussi aider des adultes plus âgés à mieux dormir.

Examinons de plus près les résultats des recherches portant sur la mélatonine relativement à divers problèmes liés au sommeil, ainsi que tous les détails disponibles sur le dosage et le choix du moment.

1. Insomnie

En ce qui concerne la capacité de la mélatonine à soulager l’insomnie (un trouble du sommeil caractérisé par des difficultés à s’endormir, à rester endormi, ou les deux), les avis sont partagés. Une méta-analyse de 2013 a révélé que les sujets souffrant d’insomnie qui prenaient de la mélatonine s’endormaient environ sept minutes plus vite, dormaient plus longtemps et avaient une meilleure qualité de sommeil globale que les personnes qui prenaient un placebo. Cependant, d’autres recherches, notamment une petite étude de 2003 menée auprès de patients souffrant d’insomnie primaire et publiée dans le Journal of Psychiatry & Neuroscience, n’ont reconnu aucun bienfait à l’utilisation de la mélatonine. 

L’AASM ne recommande pas la prise de suppléments de mélatonine pour l’insomnie chronique actuellement, étant donné le manque de preuves solides sur l’efficacité ou la sécurité à long terme. Pour les insomnies ponctuelles et de courte durée, le Dr Ramar indique que la mélatonine peut offrir un certain soulagement. 

La dose qu’il recommande en général : jusqu’à 5 mg de mélatonine environ une demi-heure avant l’heure prévue du coucher. Il suggère de commencer avec 1 mg seulement et d’augmenter la dose jusqu’à 5 mg en fonction des besoins. 

2. Décalage horaire

En franchissant les fuseaux horaires, de nombreuses personnes expérimentent le décalage horaire, une perturbation de l’horloge interne du corps qui peut rendre difficile le fait de s’endormir (et de se réveiller) en fonction de l’heure locale. Une analyse de recherche publiée en 2014 a permis de constater que la mélatonine pourrait être plus efficace qu’un placebo pour atténuer le décalage horaire après les vols à la fois vers l’est et vers l’ouest. 

Aucune stratégie universelle ne peut gérer les effets du décalage horaire à l’aide de la mélatonine. La Dre Vora préfère une approche préventive : en commençant à prendre 0,5 mg de mélatonine trois jours avant votre vol et, en vous basant sur l’heure locale de votre destination, 30 minutes avant l’heure de votre futur coucher. « De cette manière, vous informez votre corps à l’avance de la nouvelle heure à laquelle vous dormirez, vous aurez donc besoin d’un peu moins de temps pour vous adapter à votre arrivée », précise la Dre Vora.

3. Trouble lié au travail par quarts

Si votre travail vous oblige à travailler la nuit, il se peut que vous ayez du mal à vous endormir quand vous en avez besoin, c’est-à-dire pendant la journée. Un supplément de mélatonine pourrait-il vous aider à vous assoupir? Les études sur le travail en équipe et la mélatonine ont jusqu’à présent été petites ou peu concluantes, selon les National Institutes of Health (NIH). Par exemple, une analyse de recherche publiée en 2014 a révélé que les travailleurs et les travailleuses ayant des horaires non traditionnels et qui prenaient de la mélatonine après un quart de travail dormaient environ 24 minutes de plus que les personnes qui avaient pris un placebo. Cependant, le nombre de sujets étudiés n’était que de 263 personnes, et des facteurs comme le temps nécessaire pour s’endormir ne présentaient pas de différence d’un groupe à l’autre. Les chercheurs ont décrit leurs résultats en faveur de la mélatonine comme des « preuves de faible qualité ».

Si vous présentez des signes de trouble lié au travail par quarts (une perturbation chronique des habitudes de sommeil résultant d’un horaire de travail non traditionnel), consultez votre médecin au sujet des moyens de gérer et d’améliorer votre sommeil.

4. Syndrome de retard de phase du sommeil

Le syndrome de retard de phase du sommeil, ou syndrome de retard de phase du rythme veille-sommeil (SRPS), se produit lorsque l’horloge biologique indique à une personne de s’endormir plus tard et de se réveiller plus tard qu’elle ne le souhaiterait, par exemple, dormir de 3 heures à 11 heures du matin. Pour les personnes qui voudraient changer leur horaire de sommeil pour un autre plus tôt, un supplément de mélatonine peut être utile, selon le Dr Ramar. 

Bien que les résultats soient variables, ils tendent vers le positif. « Certaines données suggèrent que l’on pourrait prendre une dose [standard] de mélatonine (généralement de 0,1 mg à 0,5 mg, au maximum), environ quatre à cinq heures avant l’heure de sommeil souhaitée », ajoute le Dr Ramar. Si vous avez tendance à attendre jusqu’à 2 heures du matin avant de vous endormir, alors que vous vouliez être en train de rêver à 22 heures, une dose de mélatonine prise entre 17 et 18 heures pourrait vous aider à vous assoupir à l’heure voulue.

Bienfaits de la mélatonine au-delà du sommeil

En plus des avantages potentiels de la mélatonine en ce qui concerne le sommeil, certaines études préliminaires suggèrent que ce supplément pourrait être utile pour traiter d’autres problèmes de santé. D’autres recherches seront nécessaires pour le confirmer. Il est important de consulter votre médecin avant d’utiliser la mélatonine pour l’une des raisons suivantes.

1. Mélatonine comme antioxydant

Un certain nombre d’études corroborent l’affirmation selon laquelle la mélatonine possède des propriétés antioxydantes. L’hormone est reconnue pour combattre les dommages oxydatifs des cellules et des tissus et pour stimuler la production d’enzymes qui métabolisent les radicaux libres. Il a également été démontré que la mélatonine possède des propriétés anti-inflammatoires. 

2. Mélatonine et acouphène

Certaines recherches indiquent que la mélatonine pourrait contribuer à atténuer l’acouphène, qui est une sensation de tintement ou de bourdonnement constant ou intermittent dans l’une ou les deux oreilles. L’acouphène peut être provoqué par des lésions auditives, par des conditions sous-jacentes, comme l’hypertension artérielle, ou par l’utilisation de certains médicaments, comme les aminosides. 

Dans le cadre d’une petite étude, des patients recevant une dose de 3 mg de mélatonine par nuit pendant un mois ont constaté que leurs symptômes d’acouphène étaient sensiblement réduits par rapport à un groupe placebo. Une autre étude a constaté que la mélatonine était jusqu’à 150 fois plus efficace qu’un autre traitement pour réduire les symptômes d’acouphène causés par les aminosides et les médicaments de chimiothérapie.

3. Mélatonine et cancer

Selon une analyse de recherche de 2017 publiée dans le journal Oncotarget, la mélatonine pourrait présenter des propriétés anticancéreuses. La majeure partie des recherches menées à ce jour porte sur la mélatonine et le cancer du sein. Des études en laboratoire ont démontré que la mélatonine possède des effets anti-prolifératifs sur les cellules cancéreuses du sein, qu’elle inhibe la croissance des tumeurs mammaires chez les rats, et qu’elle induit l’apoptose (la mort programmée des cellules cancéreuses). 

Il convient toutefois de noter que les NIH préviennent que les études sur la mélatonine et le cancer ont été confondues et que la mélatonine peut interférer avec les traitements classiques contre le cancer. 

4. Mélatonine et santé du tube digestif

Selon certaines études, les propriétés antioxydantes de la mélatonine peuvent aider à soulager les ulcères et les brûlures d’estomac. Une petite étude réalisée auprès de 36 volontaires a déterminé que la mélatonine pourrait protéger la muqueuse gastro-intestinale des dommages oxydatifs et aider à soulager les symptômes du reflux gastro-œsophagien pathologique ou GERD, y compris les brûlures d’estomac, à la fois seule et en combinaison avec l’oméprazole. 

Une autre petite étude, celle-ci portant sur 42 sujets, a permis de constater que cette même combinaison conduisait à une guérison plus rapide des ulcères de l’estomac causés par la bactérie H. pylori que le seul traitement par l’oméprazole. Il faudra cependant poursuivre les recherches pour démontrer l’efficacité de la mélatonine dans le traitement des problèmes de santé liés à l’intestin. 

5. Mélatonine et santé des yeux

Comme la production de mélatonine dans l’organisme a tendance à diminuer avec l’âge, les personnes âgées qui prennent un supplément pourraient obtenir un certain soulagement des troubles de la vision liés à l’âge. Dans une étude de cas au stade préliminaire, des volontaires atteints de dégénérescence maculaire liée à l’âge qui ont pris une dose de mélatonine de 3 mg par jour pendant plusieurs mois ont semblé constater un ralentissement de l’évolution normale des problèmes de vision. La mélatonine semble également avoir un effet protecteur sur la rétine. Il convient de réaliser davantage de recherches, notamment au sujet de l’utilisation à long terme de la mélatonine, qui serait probablement nécessaire dans de tels cas. 

Effets secondaires de la mélatonine

Bien que les suppléments de mélatonine imitent une hormone naturellement présente dans l’organisme, les chercheurs n’ont pas encore tiré de conclusions définitives concernant les effets secondaires associés à une utilisation prolongée. 

Une utilisation à court terme, inférieure à trois mois, semble sécuritaire, selon les NIH. Une étude publiée en 2015 consacrée à la sécurité des suppléments de mélatonine publiée dans la revue Clinical Drug Investigation a révélé que les effets secondaires indésirables légers peuvent comprendre :

  • Maux de tête
  • Étourdissements
  • Nausée
  • Somnolence

Si vous prenez déjà des médicaments ou d’autres suppléments, il est préférable de vérifier auprès de votre médecin les interactions potentielles avant d’intégrer la mélatonine dans votre mode de vie. Selon la clinique Mayo, la mélatonine peut avoir des interactions négatives avec les anticoagulants, les médicaments contre l’hypertension, les contraceptifs, les médicaments contre le diabète, les immunosuppresseurs et d’autres médicaments.

La mélatonine est la seule hormone disponible aux États-Unis sous forme de supplément en vente libre, car elle est naturellement présente dans certains aliments, en particulier dans les cerises sures. Les suppléments de mélatonine, contrairement aux médicaments, ne sont pas soumis à des mesures de contrôle de la sûreté et de la qualité par le Secrétariat américain aux produits alimentaires et pharmaceutiques. Une analyse de l’AASM publiée en 2017 portant sur 31 suppléments de mélatonine a révélé que 71 % des produits contenaient des quantités de mélatonine sensiblement différentes des quantités indiquées sur les étiquettes : certains produits en contenaient beaucoup plus, d’autres beaucoup moins.

Si vous décidez de prendre un supplément de mélatonine, recherchez un sceau indiquant la vérification par des tiers, comme « USP Verified », qui indique que la marque a été testée de manière indépendante afin de garantir l’exactitude de son étiquetage. 

La mélatonine est-elle sécuritaire pour les enfants?

Selon l’American Academy of Pediatrics (AAP), on estime que 15 % à 25 % des enfants éprouvent des difficultés à s’endormir et à rester endormis. Au fil du temps, les enfants qui accumulent régulièrement un déficit de sommeil peuvent avoir du mal à être attentifs à l’école, se plaindre de maux de tête ou connaître une prise de poids. Selon un sondage mené par les CDC, environ 419 000 enfants aux États-Unis ont pris de la mélatonine, en date de 2012. 

L’AAP soutient que la mélatonine peut aider certains enfants à mieux dormir en cas d’utilisation à court terme, mais seulement si elle est associée à de bonnes habitudes de sommeil. Le fait de maintenir une heure de sommeil constante, sans appareils électroniques pendant au moins une heure avant de dormir, peut contribuer au bon sommeil des enfants.  

Avant d’autoriser votre enfant à prendre de la mélatonine, discutez avec son médecin du choix du moment et du dosage appropriés. L’AAP note que de très faibles doses (0,5 mg ou 1 mg, 30 à 90 minutes avant l’heure du coucher) pourraient être suffisantes.

Autres avantages potentiels de l’utilisation de la mélatonine chez les enfants

La recherche laisse entrevoir certains avantages potentiels de la mélatonine pour le sommeil des enfants souffrant de troubles neurodéveloppementaux. Selon une analyse documentaire publiée en 2011 dans l’International Journal of Pediatrics, la mélatonine pourrait améliorer le sommeil des enfants souffrant de troubles de l’hyperactivité avec déficit de l’attention (TDAH) ou d’autisme. L’AAP souligne que dans ces cas, l’utilisation de la mélatonine doit être soigneusement supervisée par le pédiatre de l’enfant. 

Effets secondaires de la mélatonine chez les enfants

Bien que les suppléments de mélatonine semblent être sans danger pour la plupart des enfants lorsqu’ils sont pris pendant une période limitée, on en sait moins sur leur utilisation à long terme. Dans la mesure où la mélatonine est une hormone, il est possible, bien que cela ne soit pas prouvé, que le supplément puisse affecter négativement la croissance et le développement, en particulier au cours de la puberté, selon les NIH. 

Le fin mot de l’histoire : devriez-vous prendre de la mélatonine?

Les suppléments de mélatonine sont un médicament en vente libre très apprécié des personnes qui cherchent à mieux dormir. Les recherches indiquent que la mélatonine pourrait contribuer à optimiser l’horloge biologique interne (le rythme circadien) et à favoriser un sommeil plus réparateur, en particulier chez les adultes souffrant de décalage horaire, de troubles du sommeil ou de périodes d’insomnie de courte durée.

Globalement, cependant, les recherches en faveur de l’utilisation de la mélatonine sont mitigées, et des effets secondaires demeurent possibles. L’effet de la mélatonine sur les affections non liées au sommeil (comme l’acouphène et le cancer) n’est pas encore clair ni bien établi.

Une bonne pratique de l’hygiène du sommeil est indispensable pour améliorer le sommeil des adultes et des enfants. Parmi les exemples d’habitudes favorisant le sommeil, citons le maintien d’une heure de coucher constante, l’exposition à la lumière pendant la journée et la limitation de l’exposition à la lumière des appareils électroniques dans l’heure précédant le coucher.

Si vous décidez de prendre de la mélatonine, consultez d’abord votre médecin. Renseignez-vous sur la marque recommandée par votre médecin ou achetez un supplément portant le sceau de qualité indiquant la vérification par des tiers.