Les gens qui se souviennent de l’arrivée sur le marché du Jolt Cola en 1985 savent que les boissons à fortes teneurs en sucre et en caféine ne datent pas d’hier. Les premières publicités de Jolt vantaient les capacités du produit à combattre la somnolence avec le slogan : « Deux fois plus de sucre et de caféine ». Ce n’est donc pas tellement surprenant que le nom du produit ait été changé à Jolt Energy à la fin des années 1990.
Depuis le lancement réussi du produit Red Bull aux États-Unis, des centaines de marques de boissons énergisantes se font la lutte pour conquérir un marché mondial valant plusieurs milliards de dollars. Les publicités nous invitent entre autres à « faire la fête comme une vedette rock », à sortir de l’ordinaire, à nous exciter. (Toujours l’idée du « jolt », du sursaut d’énergie!)
Mais de quelle sorte d’énergie parle-t-on au juste?
Mélanges d’ingrédients d’origine végétale
Les fabricants affirment que les boissons énergisantes contiennent plus que de la caféine et du sucre. Ils avancent que leurs produits rehaussent l’endurance et favorisent le bien-être grâce aux propriétés médicinales des ingrédients qu’ils contiennent comme le ginseng, l’extrait de chardon Marie, la taurine, le Gingko biloba et les vitamines du groupe B. Par exemple, Rockstar est vendu comme un « puissant mélange d’extraits naturels de plantes » qui est « spécialement formulé pour donner un sursaut d’énergie incroyable ».
Toutefois, très peu de recherches ont été entreprises pour étayer les allégations voulant que les doses de vitamines, de composés, de plantes et d’extraits contenues dans les boissons énergisantes aient un effet bénéfique sur la vivacité mentale ou l’endurance physique.
De fait, certains rapports concluent que ces suppléments n’apportent aucun bénéfice sur le plan nutritionnel aux personnes qui les consomment. Une étude publiée en 2008 dans le Journal of American Pharmacists Association a conclu que : « Les quantités de guarana, de taurine et de ginseng contenues dans les boissons énergisantes populaires sont bien en deçà des quantités requises pour procurer soit des avantages thérapeutiques ou des effets indésirables ».
Bien que certaines boissons énergisantes aient une longue liste de suppléments, ceux-ci ne sont probablement pas la cause du sursaut d’énergie que ressentent les consommateurs. Un rapport paru en 2010 dans The Physician and Sportsmedicine conclut : « L’effet ergogène des boissons énergisantes est sans doute attribuable à leur teneur en caféine et en glucose ».
Il en faut plus qu’une cuillerée de sucre pour avaler cette pilule!
Montée… et descente de sucre
Les boissons énergisantes contiennent surtout de l’eau et un produit sucrant, comme du sirop de maïs, du sucrose ou un autre genre de sucre. Le sucre procure un sursaut d’énergie instantané parce qu’il est vite absorbé par la circulation sanguine.
Toutefois, une hausse rapide de la glycémie stimule la réponse insulinique, ce qui provoque une courte sensation d’euphorie et de bien-être, rapidement suivie d’un sentiment de fatigue. Plusieurs d’entre nous peuvent témoigner que ces hauts et ces bas nous laissent en fin de compte dans un état d’apathie alors qu’on aurait pu croire que la consommation de la boisson énergisante allait au contraire donner un sursaut d’énergie.
Quand on pense que la taille des canettes de certaines boissons énergisantes a augmenté 300 fois, on n’est donc pas surpris d’apprendre que la quantité de sucre de chaque canette a aussi augmenté considérablement. En 2009, Men’s Health a décerné à la mégacanette de Rockstar le titre de « pire boisson énergisante », en mentionnant au passage que la canette de 500 ml (16 oz) contenait 65 grammes de sucre (l’équivalent de 17 cuillères à thé!). Full Throttle en contient 58 grammes; Monster Energy, 54. (Notons que certaines de ces marques indiquent qu’une canette contient deux portions, mais le consommateur moyen boit tout le contenu d’une canette ou d’une bouteille.)
Les taux élevés de sucre peuvent réduire la capacité de l’organisme à absorber les liquides. Lorsqu’on les consomme juste avant de faire de l’exercice ou pendant, les boissons énergisantes peuvent provoquer la déshydratation et des douleurs gastro-intestinales. Même si les fabricants font valoir que leurs produits ne sont pas des remplacements liquidiens (comme le sont les boissons pour les sportifs), les campagnes publicitaires renforcent l’image d’une relation positive entre leur consommation et l’exercice.
Plusieurs marques ont mis sur le marché des versions de leurs produits qui sont sucrés artificiellement. Ironiquement, ces boissons sans sucre deviennent des boissons « soi-disant » énergisantes puisqu’elles ne contiennent pas de calories et donc, n’apportent aucune énergie! Qu’est-ce qu’elles procurent au bout du compte? Une brève sensation d’euphorie.
La sensation d’euphorie
Le principal ingrédient stimulant des boissons énergisantes est la caféine. La teneur en caféine n’est pas toujours indiquée en entier sur l’étiquette du produit, entre autres parce qu’il peut y avoir des ingrédients qui contiennent de la caféine comme le guarana ou la yerba mate.
Certaines boissons énergisantes contiennent moins de 100 mg de caféine par portion, mais d’autres en contiennent de fortes doses. Le Spike Hardcore Energy shooter (275 ml ou 8,4 oz) en contient 300 mg et la Cocaine Energy Drink, 280. Par comparaison, une dose équivalente de café contient environ 130 mg de caféine.
Alors que certaines études indiquent que des quantités limitées de caféine peuvent améliorer l’humeur, la vivacité, la mémoire et la concentration, l’efficacité de la caféine pour améliorer la performance et l’endurance physiques n’a pas été prouvée.
Après des recherches approfondies, l’Agence mondiale antidopage a retiré la caféine de sa liste de substances interdites en 2004. Cette décision indique qu’il y a bien peu de preuves pour justifier l’usage de la caféine comme stimulant pour améliorer les performances.
De plus, l’on associe à de fortes doses de caféine les crampes musculaires, la nausée, la déshydratation et un pouls irrégulier, ce qui de toute évidence peut diminuer la performance plutôt que de l’améliorer.
Même si les boissons énergisantes sont recommandées pour les adultes, elles sont populaires auprès des enfants et des adolescents, et il n’existe aucune interdiction de vente aux mineurs.
Santé Canada s’en mêle
Santé Canada avait d’abord classé les boissons énergisantes dans la catégorie des « produits de santé naturels », en fonction des suppléments qui se trouvent sur la liste des ingrédients. Mais en octobre 2011, le gouvernement a lancé sa nouvelle approche à l’égard des boissons énergisantes, qui classe désormais les boissons énergisantes dans la catégorie des « aliments ». Du même coup, le gouvernement a aussi annoncé de nouvelles mesures conçues pour aider les Canadiens à prendre des décisions éclairées à l’égard de ces produits, ce qui réduira le risque de surconsommation de café et d’autres ingrédients.