L’impact de nos amis sur notre poids

Ce que montrent les études concernant l’influence que nos amis exercent sur nous.
Publié 17 juillet 2018 | Mis à jour 23 septembre 2022

La façon dont les amis influent sur le poids — le comment, le quand ou le pourquoi de la chose – n’est pas si simple à comprendre et des nouvelles alarmantes circulent relatives à l’effet des amis sur le poids. Une étude de la Harvard Medical School publiée dans le New England Journal of Medicine nous met même en garde contre la propagation de l’obésité parmi les amis et les réseaux sociaux. D’autres études de plus petite envergure ont tiré des conclusions semblables.

Au-delà des manchettes effrayantes, dans une revue de la documentation scientifique à cet égard publiée en 2012 dans Social Science & Medicine, la chercheuse en chef Solveig Cunningham Argeseanu, professeure agrégée à la Rollins School of Public Health d’Emory University, à Atlanta, a trouvé que chacune des 16 études revues par des pairs montrait un lien important entre les amis et le poids corporel, mais que dans la plupart des cas, une cause définitive ne pouvait être établie.

Les amis que nous avons tendance à choisir

En ce qui a trait à l’association entre les amis et le poids, les chercheurs se penchent souvent sur l’homophilie, un terme sociologique signifiant « amour de ce qui est pareil » ou le fait de choisir notre réseau social en fonction de notre attirance pour ce qui est semblable à nous.

« Nous savons que nous aimons choisir comme amis des personnes qui nous ressemblent de nombreuses façons », dit Mme Argeseanu. « Lorsqu’on cherche à déterminer si les amis influent réellement sur eux-mêmes pour faire des choses saines ou malsaines, les trajectoires de l’influence sont un peu plus compliquées à cerner. »

Jusqu’à présent, le lien entre l’amitié et le poids n’a pas été entièrement isolé d’une panoplie d’autres situations influant sur le poids d’une personne : l’éducation, le statut socioéconomique et d’autres obstacles à ou facilitateurs motivant l’alimentation saine. « Pour ce qui est de la perte de poids, il y a encore beaucoup de choses que nous ne savons pas par rapport aux personnes individuelles et aux groupes », affirme Mme Argeseanu, en ajoutant que le lien entre les amis et le poids résulte probablement d’un mélange d’homophilie et d’influence. C’est la portée de chacun de ces facteurs qui n’a pas encore été précisée.

Le chevauchement de nos vies quotidiennes et de nos amitiés est un élément essentiel à considérer pour résoudre ce casse-tête. Et il s’agit d’une autre raison pour laquelle les chercheurs ne peuvent affirmer que ce sont uniquement nos amis qui influent sur notre poids, ajoute Mme Argeseanu. « Si vous êtes toujours avec la même personne, vous faites probablement beaucoup de choses ensemble. Mais, vous partagez aussi le même environnement, alors il devient assez difficile [de différencier entre] ce qui exerce réellement une influence sur vous et le simple fait de vivre les mêmes expériences. »

L’alimentation et le temps passé avec les amis

Selon Mme Argeseanu, les chercheurs commencent à étudier une façon particulière dont nos amis pourraient nous influencer, c’est-à-dire comment nous passons du temps avec eux et d’autres dans notre réseau social. « En réalité, la plupart des choses que nous faisons avec nos amis incluent une combinaison quelconque de manger, boire et s’asseoir », indique-t-elle.

Quant à l’alimentation dans des situations sociales, les études mettent souvent en lumière l’effet des distractions, explique Mme Argeseanu. « Si je fais quelque chose (comme vous parler ou regarder la télé), j’ai tendance à perdre de vue, à ne pas vraiment penser à combien je mange ou ce que je mange. »

Peu importe l’état de l’amitié, manger avec quelqu’un d’autre augmente de manière considérable notre apport alimentaire, souligne Brian Wansink, auteur de Slim by Design, qui étudie les habitudes alimentaires des consommateurs en tant que directeur du Food & Brand Lab à Cornell University. Il a découvert que nous consommons 30 pour cent plus d’aliments lorsque nous mangeons en compagnie d’une autre personne. En mangeant avec sept personnes ou plus, notre consommation alimentaire grimpe de plus de 90 pour cent. « Entourés d’amis, nous avons tendance à manger plus longtemps. C’est un événement », indique M. Wansink.

Par rapport à l’alimentation sociale, M. Wansink a aussi noté ce qu’il appelle l’effet de la « préparation du terrain » déclenché par la première personne qui commande. « Si vous êtes à table et que la première personne commande un plat assez extravagant, il est plus probable que son choix ait la même influence sur vous, car essentiellement votre ami vous donne ainsi la permission de manger, de commander des plats différents de ceux que vous voudriez autrement », déclare-t-il. « L’alimentation saine est beaucoup moins influençable que l’alimentation malsaine. Surtout, vos amis vous accordent la permission de vous amuser. »

Motivation amicale

Il y a tout de même du positif en ce qui a trait à l’amitié. Des études d’intervention sur les programmes d’exercice auxquels participaient des amis ont montré que les amis se motivent à plus long terme, dit Mme Argeseanu. En 2013, une revue de la documentation scientifique par Mme Argeseanu et son équipe sur comment les amitiés influent sur l’activité physique des enfants a constaté que les enfants dans une classe de course à pied couraient plus longtemps si leurs amis étaient avec eux. « Si vous courez aux côtés d’une personne avec qui vous pouvez bavarder, vous poursuivrez sans doute davantage vos efforts. Ou, si vous voulez arrêter, mais que votre compagnon continue, vous continuerez aussi », explique Mme Argeseanu.

Et la tendance se maintient à mesure que vous vieillissez. Dans le cadre d’études effectuées par Tim Lohman, Ph. D., professeur émérite à l’University of Arizona, à Tucson, des groupes d’amis avec des objectifs semblables qui se rencontrent pour parler de défis et de succès sont enclins à garder le cap plus longtemps. Dans certains cas, ils continuent même après l’atteinte de l’objectif.

Et les bonnes nouvelles ne s’arrêtent pas là! Une étude publiée dans le Journal of Health Economics reproduisant les résultats de l’étude susmentionnée de Harvard a conclu que l’obésité n’est pas contagieuse. Selon l’étude, « Les estimations ponctuelles de “l’effet des réseaux sociaux” sont réduites et deviennent indifférenciables sur le plan statistique de zéro une fois que des techniques économétriques standards sont appliquées ». Bref, respirez profondément et gardez vos amis — pourvu qu’ils vous appuient.